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Equipe de la Ligue de Normandie de parapente Actualité des compétiteurs parapentistes normands

Entretien avec Edouard : le syndrome du plaisir

lereseaudepp
7 ans de pratique en un carnet

7 ans de pratique en un carnet

Patrick :
Peux tu nous retracer rapidement ta progression du premier cross en CFD en 2014 jusque cette année 2018 où tu termines premier au classement Compétition Plaine ?

Edouard :
J’ai déclaré mon premier cross CFD en Mai 2014 puis mon premier 50 kms 3 mois plus tard. 
C’est ce vol qui m’a vraiment rendu accro au cross. Je me souviens de la vue lointaine sur le Mont saint Michel comme si c’était hier. Ensuite j’ai pas mal volé dans la région avec un mélange, comme tout le monde par chez nous, Cross / Bord de mer.

Bien qu'ayant participé à ma 1ere manche de compétition le jour du record de France de Martin MORLET, ce n’était que de la pure curiosité. J’en garde le souvenir d’un très beau vol de 60km.
J’avais juste envie de crosser, de voler et de découvrir. 

En 2017 je me suis inscrit à de nombreuses compétitions mais je n’ai participé qu’à la manche de Crocy au treuil pour y faire un plouf. J’ai annulé toutes les autres n’ayant pas vraiment le temps ni l’esprit tranquille pour voler sereinement (le fameux problème des assurances).

Depuis tout ce temps, le gonflage reste toujours la partie de l’activité que je préfère. Je ne peux pas m’en passer. Jouer avec son aile, été comme hiver, au déco, avant un cross, en bord de mer est pour moi la chose la plus importante.

Patrick :
Donc arrive 2018 et la découverte de nouvelles régions en compétition.

Edouard :
Cette année j’avais véritablement envie de participer à plusieurs manches en dehors de mes petites habitudes de cross en Suisse Normande pour essayer de mieux comprendre, de progresser techniquement (en essayant de voler plus efficacement) et mentalement (en essayant de mieux décrypter les sources de stress et de plaisirs. ).

J’ai également profité de l’émulation portée par la naissance d’un petit groupe compétition au sein du club AS ICARE sous l’impulsion de Thibaut Lavolé.

J’ai adoré voler dans les Ardennes. Les décollages ressemblent énormément à nos sites normands. Nous avons eu la chance d’avoir eu des conditions idéales nous permettant de prendre le départ de 3 manches. 
Ce type de site implique souvent des manches en temps mini ce qui finalement, ressemble beaucoup à notre pratique quotidienne du cross. C’est une région idéale pour le pilote de cross normand désirant débuter la compétition en douceur et sans trop de dépaysement. 

Pour les Vosges, c’est une étape au dessus je trouve. Les sites permettent de lancer des manches en course au but ce qui rajoute une nouveauté et plonge vraiment dans l’ambiance compétition. 
La configuration du relief ajoute également une dose supplémentaire de complexité avec des petits reliefs, des vallées, des conditions parfois plus généreuses. J’ai souvent volé au début de la manche en mode compétition. Comme je vole très lentement, je suis, presque à chaque fois, repassé en mode CFD dès les 1ers Km. 

Ma ligne rouge en participant aux compétitions était surtout de ne pas voler avec les objectifs des autres. Dès que ça dépassait mon niveau, je repassais en mode CFD. Sur la saison, j’ai bouclé 3 manches sur 6 et plutôt bien terminé sur les autres manches. La régularité moyenne  paye.

Patrick :
Quel est l'impact de la compétition sur ta pratique quotidienne ?

Edouard :
L'impact a été énorme.

Par exemple le fait de préparer une manche. Depuis cette expérience de compétition, je prépare aussi mon cross le matin en me fixant avant de décoller une balise, au cas où . . . Le fait de me confronter à des situations nouvelles m’a permis de mieux comprendre une façon très particulière que j’ai de fonctionner en vol. 

J’ai réussi à mettre des mots sur quelque chose dont je n'avais pas forcément conscience : le syndrome du joli vol.

Pour la petite anecdote : lors de la toute première manche de la saison dans les Vosges, j’ai eu une réaction très surprenante mais tout autant révélatrice de mon fonctionnement. Pendant celle-ci, j’avaisi perdu le groupe de vue depuis un moment. Le parcours nous amenait pour la dernière balise à repasser au dessus de l’atterrissage d’Oderen. En survolant l’atterro (et son bar), j’ai tout simplement sabordé mon vol, en quittant tout d’un coup la manche, pour venir poser. 
A ce moment dans ma tête, je me souviens m’être dit la chose suivante :  bon ben les autres ont dû rentrer depuis longtemps au goal, la balise suivante me semble bien difficile, j’ai déjà fait un beau vol, je vais en rester là, je suis super content, c’était génial ! La balise suivante était, en fait, à portée de glide. Les deux pilotes, avec qui j’étais, l’ont claqué sans difficulté pour terminer respectivement 1er de la catégorie sport et 3ième en open.
Après un petit débriefing avec Thibaut, j’ai réalisé que je fonctionnais comme ça quasiment tout le temps en cross mais sans vraiment m’en rendre compte. 

Ce n’est pas que j’ai tendance à jeter l’éponge mais c’est juste que la grande satisfaction du moment. Quelques heures de nuage en nuage, un beau soleil, des bonnes sensations me pousse souvent à en rester là, heureux de mon vol ! 

J’ai beaucoup réfléchi tout le reste de la saison. Alors que je pensais avoir bien progressé sur ce point, je me suis aperçu que je souffrais encore gravement de ce syndrome lors de mon dernier cross au départ de St Marc. 
J’avais, en décollant, pour objectif de réaliser un vol de 100 kms. Malheureusement une fois cet objectif atteint, j’ai à nouveau eu cette réaction : c’est bon j’ai réalisé mon objectif du jour, je suis super content, 100 kms c’est incroyable. En analysant la trace, on peut s’apercevoir que sur la fin du vol je traverse un thermique généreux qui me fait gagner 200 m en ligne droite sans même l’enrouler : quel gâchis !

Avec la compétition, j’ai mis le doigt sur quelque chose d’important à travailler pour 2019 si je veux envisager des vols demandant un peu plus de persévérance.
On voit bien que je ne suis pas un compétiteur dans l'âme mais je vais me soigner ;-)

Patrick :
Tu fais référence plusieurs fois au rôle de Thibaut. Un conseil ?

Edouard :
Prendre du temps pour débriefer avec un copain volant plus expérimenté est vraiment quelque chose d’intéressant. La retranscription d’une émotion, d’un sentiment, d’un ressenti oblige dans un premier temps à se mettre à l’écoute de soi même, du moment que l’on vient de vivre. C’est peut être là le plus important.

Cet exercice est très formateur et riche d’enseignements car souvent, avant même le retour de Thibaut, j’avais déjà trouvé mes propres réponses.

Patrick :
En terme de déclarations CFD en Normandie, cela a été une très bonne année pour toi. Une analyse ?

Edouard :
J’ai eu la chance de me libérer les bonnes journées je crois et d’être prêt à décoller au bon moment ! Mais globalement, je recherche dorénavant plus qu’à mes débuts, des sensations en vol, de glisse, des lumières, des paysages. 

Mon rêve serait de poser au coucher du soleil après une journée de vol, peu importe le nombre de kilomètres ! 

Patrick :
Cela nous amène à 2019. Des objectifs ?

Edouard :
Oui un paquet ! 
Me faire un cross avec Sylvain Bobo depuis le site magique de Plouezec. J’ai eu l’occasion d’y voler pour la première fois cette année et d’y faire un tout petit cross : l’extraction depuis la plage, j’en rêve encore ! 

Participer à quelques compétitions chez nous, dans les Ardennes,  les Vosges mais aussi un peu dans les Alpes.  Pourquoi pas le championnat de France été 2019, c’est en réflexion ! 

Et surtout continuer de progresser. J’ai toujours l’impression d’être un débutant dans l’activité et c’est un grand plaisir.

 

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